lundi 24 février 2014

Chemins perdus

Il est surprenant de voir comment, surtout après un hiver et un printemps pluvieux, un sentier peut être détruit par la pratique du moto-cross.

Je pense en écrivant cela, à cette sente assez rude, qui, depuis l'arrière de la gare de Chanteuges, monte vers la Combe et Chirac. Les pierres jadis soigneusement disposées pour former un sentier, gisent à présent ça et là, retournées, comme disloquées par l'incessant labourage des pneus crantés. Le long serpent du chemin, avec ses écailles de pierre polie - que l'on devine encore par rares places - est devenu cette ravine bourbeuse qu'affectionnent les motards si j'en crois la physionomie de leurs circuits de compétition.

J'imagine les mains des pères, aidés du cantonnier, qui ont peut-être bâti ce chemin pour que les écoliers du hameau trouvent un appui plus sur par les soirs d'hiver, pour qu'ils arrivent à l'école avec des sabots moins crottés ? Mais il y a bien longtemps que les écoliers ne passent plus par là, quant aux randonneurs, on les a détournés sur d'autres voies balisées. Donc le chemin, de fait, est désormais dédié au seul usage des motos ravageuses. Ailleurs ce seront des 4x4 ou des quads qui se chargeront de la destruction.

La campagne devient ce monde où le chemin du marcheur ne survit que balisé, emprunté par des caravanes de randonneurs, devenu enjeu économique comme le "Saint-Jacques", le "Stevenson". Sinon, l'amateur de sport mécanique le transforme en bourbier impraticable ou bien le paysan en fait un roncier, une décharge, lorsqu'il ne l'inclut pas tout bonnement à son labour. Ne menant plus nulle part, le chemin se heurte à une clôture, ou disparait sous la végétation.

Pourtant que ces anciens chemins étaient signifiants! ils savaient épouser la pente la plus commode, embrasser un paysage, mener le plus rapidement d'un hameau à un village, relier l'abbaye à ses fermes.

Si nos édiles actuels ont admis que le lavoir, la croix, le puits doivent être sauvegardés, il n'en va pas de même pour le chemin qu'ils empruntent rarement - pour ne pas dire jamais - et qui pourtant donne tout son sens à ces petits amers du paysage. Mais le chemin est passage et nous voilà dans le monde du fugace, du subjectif. De plein pied dans une histoire non codifiée, le récit toujours à réécrire du trivial procédé qui consiste à se déplacer sur ses deux jambes, parfois accompagné d'une bête, d'un modeste charroi ou bien seulement de son rêve, mêlé à la poussière du monde, comme le poète et le vagabond.

1 commentaire:

  1. Bonjour

    Merci pour ces chemins perdus...Je partage tout à fait votre analyse et moi habite à Langeac je vois également les 2 chemins qui montent à Volmadet sont devenus presque inaccessibles aux marcheurs......il m'est arrivé de croiser des quad qui n'arrivent même plus à passer et obliger de mettre pied à terre pour passer dans les ornières.........et de plus en plus les motos "vertes" passent sur les cotés créant de nouveaux chemins impraticables.........Quelle misère!!!!!!

    Paul CREMEY responsable marche et découverte au Jacquemart

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