mardi 10 juillet 2007

Comme un secret…

Je sais un chemin que j’aime parce qu’il est comme un secret.
Sur la rive droite de l’Allier. Pour parvenir au chemin il faut traverser trois champs. Dans chacun d’eux l’herbe haute du printemps avant la fauchaison rend la progression bien malcommode. On passe d’un champ à l’autre par un large trou de la haie. Parvenu dans le dernier champ, il est difficile de trouver le passage / le passage / je ne le trouve pas toujours : alors je me heurte à la muraille, je me griffe à l’épine noire avant de revenir sur mes pas : c’est d’abord un trou dans les buissons, puis il serpente dans l’herbe, plus sentier de bête que piste humaine. Ensuite dans la végétation touffue, profuse, il escalade le vieux mur des chambés à demi-éboulés, il est ce mur, le bord glissant de ce mur, ce témoin poignant d’un temps tellement révolu et pourtant si proche, à peine une vie d'homme… Puis il louvoie terriblement avant de monter sur la pierre, on se doute que c’est là le chemin, mais on en a qu’après la certitude, lorsque la piste se fait plus facile, qu’elle offre ce panorama sur la rivière, les grottes à main droite, toute la vallée ouverte. Ensuite, par un pierrier il faut redescendre, retrouver le bord de l’eau, entrer au pays des aulnes. Un pays obscur et végétal, une cathédrale verte sur de noirs piliers dans laquelle le pied retrouve sa commodité et par la sente devenue plate, écartant les fougères, respirant mille odeurs, on débouche à la ferme de Tatevin, où je relève la vierge tombée dans sa niche (victime de l’orage ?) sachant la dévotion qu’Alain, le moine, a pour elle. S’il n’a pas relevé lui-même la statuette, c’est qu’il n’est pas là, mais une jeune fille qui m’offre un verre d’eau.
Alors je repars par le même chemin.

1 commentaire:

  1. Si errer, c'est d'une certaine façon s'enraciner dans l'éphémère, écrire, c'est essayer de capturer cet éphémère afin de le fixer et l'enfermer dans la durée, c'est se vouloir et devenir oiseleur du Temps.

    Jacques Lacarrière (éd: Plon / collection "Terre Humaine")

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